En plein dans le MiL : Alain Casanova doit-il rester ou quitter le RC Lens ?
Évoquant un « échec personnel » ce vendredi après la victoire contre Niort et la 4e place finale du RC Lens, Alain Casanova se retrouve forcément sur la sellette. Un an après son arrivée, l'entraîneur des Sang et Or divise au sein du club, et plus encore au sein des supporters, tant au niveau de ses ambitions de remontée dès cette saison, sa communication, sa gestion de l'effectif…
Un an après son arrivée, l'entraîneur du club lensois doit-il faire ses bagages ? Eddy, Thomas, Guillaume et Nicolas Zatti, quatre rédacteurs de l'équipe de MadeInLens,livrent leur avis sur la question.
L'avis de Thomas : « Alain Casanova devrait démissionner, s'il est fidèle à ses principes »
Une 4e place de Ligue 2, avec un nouveau coach et un effectif profondément renouvelé, ce n'est pas ce qu'on peut appeler un mauvais championnat si on s'arrête uniquement à ces critères et Alain Casanova pourrait utiliser ce bilan pour défendre sa place et son poste, arguant sur la difficulté de sa tâche pour bâtir son groupe, son schéma tactique, insistant aussi sur ses bonnes relations avec le personnel du club, son intérêt fort pour la formation et les équipes jeunes du Racing…
Mais Alain Casanova a commis des erreurs et s'est surtout lui-même savonné la planche dès son arrivée au RC Lens.
Alors que Solférino et les actionnaires se sont donnés deux ans pour monter, il annonce dès ses premiers mots qu'il vise la montée dès cette saison, que c'est l'objectif prioritaire et unique, que le club doit être totalement tourné vers la montée… Certes, s'il avait annoncé qu'il jouait la 14e place, on aurait crié au manque d'ambition mais, en annonçant cela et en le martelant toute la saison, il a accentué la pression sur son effectif et créé une attente, un espoir énorme, aujourd'hui déçu vu que l'objectif qu'il s'est fixé n'a pas été atteint.
Il a aussi bénéficié d'un contexte extrasportif apaisé cette saison, après deux saisons d'incertitudes sur les finances du club, et cela lui a permis de bâtir un effectif important, riche en qualité et en quantité qu'il n'a pas toujours bien géré. Le cas de Loïck Landre, la gestion de son effectif (je pense à Abdoul Ba, Adama Guira, Teddy Chevalier, Viktor Klonaridis… et à un manque de rotation par moment), mais aussi un recrutement pas toujours réussi (Chevalier, Klonaridis, Oparé, Guira…) ou suscitant des interrogations (Nicolas Douchez, Mohamed Fofana), la gestion des coupes où le RC Lens s'est fait sortir par le Paris FC et Bergerac, sa communication parfois maladroite... tout cela joue en sa défaveur et forcément cela pèse lourd dans le bilan.
J'ajouterai aussi qu'avec cet objectif de montée non atteint et cet échec personnel, Alain Casanova a fragilisé sa crédibilité auprès du club, des supporters et, surtout, de son effectif. Pour un entraîneur, c'est crucial, vital.
Au terme de cette saison, Alain Casanova devrait donc démissionner, s'il est fidèle à ses principes. Mais reste à voir les considérations financières car un licenciement aurait un coût non-négligeable pour un club obligé de rester en Ligue 2.
L’avis d’Eddy : « Je suis partagé sur cette question »
Je suis partagé sur cette question, car il y a beaucoup de points à soulever. Au bout d’un an à la tête de l’équipe professionnelle, il obtient une honorable quatrième place, au vu des problèmes extra-sportifs rencontrés par le club, il n’a pas été simple de bâtir une équipe compétitive dès le début de saison, et le 3-5-2 mis en place n’avait pas été assez travaillé à mon sens pour fonctionner rapidement, l’alchimie n’étant pas fait, il ne pouvait pas être efficace. Un mercato réalisé tardivement, trop peut être, a entraîné un début de saison chaotique et une série de matchs nuls qui ont pesé lourd dans la balance en fin de saison.
Le recrutement n’a pas été une catastrophe : les apports de joueurs comme Fortuné, Zoubir et Cristian ont fait du bien, et l’expérience de Douchez dans les buts a parfois sauvé une défense qui prenait l’eau. Cette non-montée en Ligue 1 dès sa première saison est pour moi totalement logique, et des erreurs ont été commises, il ne faut pas les passer sous silence. La communication n’a pas été bonne et - par exemple - dire que le match face à Strasbourg il y a quelques semaines n’était pas décisif a été une grosse erreur : les deux points perdus sont visibles au classement final, une victoire face à ce concurrent direct et Lens était en Ligue 1 à l’heure actuelle.
La mauvaise gestion de certains joueurs, qui ont disparu de la circulation ou qui n’ont pas eu de vraies chances de montrer leur potentiel comme Guira ou Oparé, ont aussi assombri la saison lensoise. Alain Casanova est très décrié de par son manque de prise de risque et par ses erreurs trop fréquentes.
Doit-il partir ou rester ? Vaste question quand on sait que le RC Lens est un grand consommateur d'entraîneur. Pour la stabilité et pour une certaine continuité, il devrait continuer le travail et gommer les grossières erreurs de cette saison, pour enfin décrocher la montée en Ligue 1 tant attendue par les supporters. Mais d’un autre côté, ses erreurs de communication, son manque de charisme et sa mauvaise gestion de certains cas sont à discuter à l’avenir, Lens se doit d’avoir des hommes de poigne pour mener à bien la mission qu’est la remontée en Ligue 1 dès la saison prochaine, et elle ne se fera pas sans combattre.
L'avis de Guillaume : des erreurs de gestion de l’effectif qui coûtent cher...
Le profil d’Alain Casanova est compatible en bien des points avec ce qu’on attend d’un entraîneur à la tête des Sang et Or. Formateur dans l’âme, investi visiblement dans la vie du club, et ayant une vision bien précise du jeu qu’il veut déployer et des moyens à utiliser pour y parvenir. Il n’a par exemple pas hésité à faire confiance tout au long de la saison à Duverne en charnière centrale, preuve en est qu’il ne craint pas de s’appuyer sur la jeune garde made in la Gaillette. De même, l’idée d’organiser les différentes équipes de jeunes dans le même système tactique que les pros était louable pour préparer l’avenir, et donner des repères aux futurs joueurs de l’équipe première. Néanmoins, parti pour installer un 3-5-2 qui aurait pu être intéressant sur la durée en Ligue 2, Casanova a été contraint de changer son fusil d’épaule suite au départ tumultueux de Landre et à la blessure longue durée de Fofana. Les errements tactiques qui s’en sont suivi (passage en 4-3-3 avant de se stabiliser sur un 4-4-2) ont perturbé la prise de repères de l’équipe, coûtant de nombreux points en début de saison à un effectif qui apprenait juste à se connaître, et dont certaines arrivées tardives ont différé la plus value apportée au rendement de l’équipe.
C’est le premier reproche que je fais au coach lensois : s’il est très précis sur ses intentions de jeu, je le trouve beaucoup moins réactif dans les changements tactiques à opérer en cours de match, en fonction de l’évolution de celui-ci. Cette “frilosité” dans sa gestion tactique ne l’a que trop rarement amené à faire des choix de coaching gagnants. Il en va ainsi de l’état d’esprit et de la confiance que portent en eux les entrants en cours de match, l’exemple le plus frappant étant pour moi celui de Mathias Autret, méconnaissable cette saison. Toujours dans la gestion de l’effectif, je reproche à Alain Casanova de s’être privé de la profondeur de banc dont il disposait initialement, en faisant des choix clairs dès l’entame de championnat, et en coupant rapidement tout espoir de mise en concurrence pour des garçons comme Ba (revenu en grâce pour suppléer la blessure de Cvetinovic), Zedadka, Bellegarde, Guira, Chouiar, et même les néo-arrivants Chevalier et Klonaridis. En se privant de cette rotation potentielle, il a puisé dans les organismes de joueurs, qui ont fini par se blesser au plus mauvais des moments, le mois d’avril ayant été un boulet que l’on aura traîné jusqu’au bout avec les absences parfois conjuguées de Cvetinovic, Bostock, Lopez et Fortuné !
Enfin il manque clairement à mes yeux une dimension de meneur d’hommes à l’ancien coach toulousain. Cette force de caractère dont bénéficiait Antoine Kombouaré par exemple, permet parfois aux joueurs de se transcender, d’avoir ce supplément d’âme qui va faire la différence. Un meneur d’hommes est aussi capable de piquer ses joueurs quand il n’est pas satisfait de leurs prestations, et ce ne fut que trop rarement le cas cette saison, Alain Casanova ne cessant de louer le jeu, le respect des principes, la générosité, mais oubliant cruellement de noter le manque de gnac de ses joueurs, notamment à Bollaert-Delelis. Une fois de plus, la gnac, ça se transmet à ses joueurs…
Quand je pèse le pour et le contre, je n’ai pas envie de voir partir Casanova coûte que coûte. Cependant, si l’opération est réalisable financièrement, et si les décideurs lensois prennent le risque de la rupture, un profil plus charismatique et meneur d’hommes, doté lui aussi de fortes certitudes tactiques, serait plus à même de tirer le meilleur d’un groupe qu’il faudra veiller à ne pas trop chambouler à l’intersaison.
L'avis de Nicolas Zatti : « Je reste sur ma faim concernant Alain Casanova »
Je reste sur ma faim concernant Alain Casanova.
D'un point de vue comptable, la non-accession en ligue 1 est un échec. Il ne faut pas se leurrer. Mais au delà de cet aspect, j'ai envie de m'attarder sur le jeu déployé par les Sang et Or.
Avons-nous constaté objectivement des progrès tout au long de la saison ? De mon point de vue, c'est non. Je ne comprends pas réellement quelle philosophie de jeu a voulu mettre en place l'ex-coach toulousain. La possession de balle ? Mais dans quel but ? Cela nous fait une belle jambe d'avoir les meilleures statistiques dans ce domaine. A de nombreuses reprises, notamment au stade Bollaert-Delelis, j'ai trouvé les équipes adverses mieux organisées et surtout plus cohérentes dans l'utilisation du ballon. Pourtant, dans les rangs lensois, la qualité des joueurs offensifs, que ce soit au milieu de terrain ou en attaque, était sans commune mesure avec nos adversaires.
Sur l'utilisation ou la non utilisation de certaines individualités, j'avoue aussi ne pas y voir très clair. Pourquoi John Bostock a évolué aussi bas alors qu'il est capable de "casser les lignes" grâce à sa qualité technique ? Pourquoi avoir recruté Adama Guira pour ne pas profiter de sa qualité athlétique ?
Quant à la gestion de l'effectif, je m'étonne de l'absence de rotations. Après, me direz-vous, il ne faut pas chercher plus loin les causes de la multiplication des blessures de nos joueurs cadres ! Et pourtant, je reste persuadé que nous possédions et la quantité et la qualité dans ce groupe renforcé notamment au mercato d'hiver.
En toute objectivité, cela fait très longtemps que nous n'avons pas vu de "jeu" à Bollaert-Delelis. De nombreux buts ont eu comme origine un exploit individuel. Comme si l'entraîneur n'attendait finalement que cela. Il est temps pour le Racing de se doter d'un coach avec un leadership affirmé et ambitieux dans le jeu. Un "Druide bis" en quelque sorte. Sinon j'ai bien peur que les désillusions se succèdent et que le formidable public lensois finisse par se lasser d'être déçu.
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