La Parole à : Pascal Peltier (2/2)
Cette saison, au travers de notre rubrique "La Parole à", MadeInLens vous propose régulièrement des interviews de personnalités qui nous apportent leur point de vue sur le Racing Club de Lens ou le football en général. Cette semaine, MadeinLens a rencontré Pascal Peltier, ancien joueur du RC Lens pendant les années 80 puis entraîneur au centre de formation. Du rêve aux déceptions, il nous parle du RC Lens vu de l’intérieur. Sans concessions, celui qui occupe aujourd’hui le poste de manager général de l’ES Bully regrette la perte d’identité du club Sang et Or.
Après avoir connu l’UEFA avec le RC Lens, la D2 avec FC Rouen, Pascal Peltier est de retour au RC Lens mais sa carrière va se terminer brusquement sur deux blessures.
Dans cette seconde partie, nous évoquons avec lui la carrière d’entraîneur qu’il va alors embrasser …
Ta carrière de joueur terminée, tu vas faire tes débuts d’entraineur ?
Il y a d’abord une année de chômage. J’étais un peu perdu, je n’avais aucun diplôme ... Je vais encore jouer 6 mois à Arras puis 6 mois à Tourcoing et, là, je me blesse à nouveau et je décide d’arrêter ma carrière. Je passe mes diplômes d’entraîneur et je reçois une proposition de Billy-Montigny avec un boulot d’agent de développement social. Je ne savais même pas ce que cela voulait dire mais j’ai accepté tout de suite ! J’ai découvert un monde complètement différent de ce que j’avais connu auparavant puisque j’avais toujours été un assisté et la vie avait toujours été dorée.
Ma carrière d’entraîneur débute donc à Billy-Montigny. Dès la première saison, on monte en PH. Au bout de six ans, je passe une année à Montigny-en-Gohelle, puis Hénin-Beaumont que je fais monter en CFA2 à la fin de la deuxième année.
C’est ensuite le retour à Lens ?
Oui, Patrice Bergues vient me chercher et me propose un contrat de 3 ans pour entrainer les U16 Nationaux. J’accepte car j’estimais que c’était une progression dans ma carrière. Et puis c’était le club de mon cœur à ce moment-là. Je retrouve un niveau assez haut avec d’excellents joueurs comme Kevin Monnet-Paquet, Adel Taarabt, David Pollet, Nolan Roux …
Comment tu expliques que tous ces garçons n’aient pas fait carrière au RC Lens ?
À cette époque, ça ne se passe pas très bien avec les gens en place. Les gamins ne se sentaient pas bien au centre de formation. J’ai essayé d’y amener un peu de convivialité mais les dirigeants ne se préoccupaient pas beaucoup de la formation. Il y a un exemple symptomatique : à mon époque, AndréDelelis, maire de Lens, venait voir chacune de nos rencontres, il connaissait le nom de tous les joueurs. On ne peut pas en dire autant de tous les gens du club…
On sent une certaine rancœur …
Oui, parce que ces personnes ont brisé mon rêve d’entraîneur. Je ne prétends pas que j’avais les qualités pour entraîner au haut niveau mais j’en avais l’ambition. J’estime être meilleur entraîneur que joueur et je n’ai pas réussi à faire carrière. C’est un grand regret. Surtout qu’on m’a remercié en 5 minutes sans aucune explication, juste pour des raisons de copinages… Il fallait trouver une place pour le mari de « machin » alors on m’a viré. Tous ces gens ne pensaient qu’à se faire du fric et ne se préoccupaient nullement de la formation des jeunes.
Le RC Lens venait pourtant de connaître les sommets avec une génération de joueurs formés au club …
À cette époque, le club a perdu son identité. On se souvient du fameux « plan quinquennal » ! Les dirigeants ont eu la folie des grandeurs et ont préféré faire venir des stars qui se servaient de Lens comme d’un tremplin. Cela a été une grosse erreur de ne plus s’appuyer sur la formation. Les jeunes qui arrivaient en équipe première, on leur en demandait plus qu’à des joueurs qui gagnaient des fortunes : Kevin Monnet-paquet, c’est vraiment un bon joueur, c’est un mec qui se serait mis en quatre pour le RC Lens, on lui en a demandé beaucoup trop tout de suite. Adel Taarabt n’a pas joué un match avec Lens. David Pollet, il joue à Anderlecht. J’ai entendu dire de lui qu’il n’avait même pas le niveau Ligue 2 ! Il y a des grands joueurs qui sont passés par le centre de formation. Comment cela se fait qu’on n’a pas su les intégrer petit à petit en prenant des gars avec de la maturité pour les encadrer, comme à Sochaux par exemple.
Cette saison, on a l’impression que le club fait de nouveau confiance aux jeunes et qu’on retrouve une certaine communion avec le public ?
Le public, c’est la seule chose qui peut vraiment attirer les joueurs à venir à Lens ! Jouer devant 30 000 personnes c’est formidable ! La seule chose qui n’a jamais changé à Lens, c’est les supporters : on peut toujours leur faire confiance, ils n’ont pas changé de mentalité. C’est vrai que c’est beau de voir les joueurs communier avec les spectateurs à la fin des matchs comme ils le font cette année. Je pense que cela vient d’Antoine Kombouaré. En même temps, je trouve que c’est normal de venir saluer ces mecs qui ne touchent parfois que le RSA et qui ne vivent que pour le RCL.
Et les jeunes qui se font une place au niveau de l’équipe première ?
On leur accorde peut-être un peu plus de confiance. Et puis il y a un gars comme Alaeddine Yahia qui me semble incarner les valeurs du RC Lens. C’est un guerrier qui tire tout le monde vers le haut. Je pense qu’il peut passer un message et encadrer les jeunes.
Tu penses que les dirigeants ont appris de ces erreurs ?
Je n’en sais rien du tout et je ne veux pas le savoir ! Je ne m’intéresse pas beaucoup à ce que peuvent faire les dirigeants lensois aujourd’hui. Ils m’ont profondément écœuré en tournant le dos à des mecs du Nord qui faisaient du super boulot. Je ne parle pas pour moi mais, par exemple, ils ont viré Jean-Michel Proville pour un médecin parisien. C’est un sacré paradoxe quand tu vois qu’il est toujours médecin fédéral pour la Fédération Française et médecin de l’équipe de France U20 !
Jean Michel Proville, justement, c’est lui qui te fait venir à Bully-les-Mines ?
Nous avions gardé contact et, quand le maire de Bully l’a sollicité pour prendre la présidence du club, il m’a demandé d’en devenir le manager général. Il y avait tout à reconstruire, en particulier au niveau des équipes de jeunes. Après huit années, nous sommes passés de 200 à 420 licenciés, de 9 à 19 éducateurs et on vient de créer une section féminine. Je suis entouré de gens compétents, ce n’est pas le travail d’un seul homme. Au niveau de notre école de football, Francky Cousin et tous les éducateurs obtiennent de très bons résultats et notre équipe première effectue sa 3e saison en PH. Je me sens très bien dans ce club.
Propos recueillis par Samuel
MadeinLens tient à remercier Pascal Peltier
pour sa disponibilité et sa sympathie pour répondre à nos questions
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